Cas récents relatifs à l’acquisition de la nationalité et au risque d’apatridie

La Haute Cour régionale de Guipúzcoa a accordé pour la première fois la nationalité espagnole à une fillette âgée de sept ans née en transit vers l’Espagne. Après n’avoir pas été reconnue par le Maroc, où elle est née, ni par le pays de sa mère, le Cameroun, ni par l’Espagne, où elle vit depuis quatre ans, les tribunaux ont finalement obligé les autorités non seulement à l’enregistrer à tous les niveaux, mais aussi à la protéger du risque d’apatridie et lui ont ainsi accordé la nationalité espagnole. La Cour a fondé sa décision sur des normes juridiques nationales et internationales, notamment la CDE (art. 3.1 et 7), la Déclaration universelle des droits de l’homme (art. 15.1), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 24) et la Convention de 1954 relatif au statut des apatrides (art. 1.1). La Cour a noté que depuis son arrivée en Espagne, la petite fille n’avait pas d’identité légale, contrairement à l’ODD 16.9, et était donc invisible. Cela signifiait qu’elle n’avait pas de carte d’assurance-maladie et qu’elle ne pouvait pas accéder aux services publics. Les juges ont rappelé que l’intérêt supérieur de l’enfant est un « objectif constitutionnellement légitime » inscrit dans les dispositions nationales. Par conséquent, ils ont fait valoir que « le fait de permettre à l’enfant de rester dans les limbes de l’apatridie, dans une situation d’inégalité par rapport aux autres enfants, représentait un préjudice important pour ses droits fondamentaux, dont le droit à l’éducation ».

Child Identity Protection (CHIP) accueille favorablement cette décision qui ordonne le rétablissement des éléments manquants de l’identité de la fillette, ce qui permettra de garantir ses droits fondamentaux et l’accès aux services de base. Cela rendra la réalité visible et, espérons-le, créera un précédent pour le nombre croissant d’enfants qui, arrivant dans de petites embarcations le long de routes maritimes dangereuses, rencontrent de nombreuses difficultés pour obtenir leurs documents et avoir accès aux droits fondamentaux.

En avril dernier, à Melilla, une fraude a été découverte concernant la paternité de 78 bébés immigrants. Selon les principaux médias espagnols, les mères auraient payé entre 1 500 et 3 000 euros à des ressortissants espagnols afin d’enregistrer les nouveau-nés comme les leurs en vue d’obtenir la nationalité espagnole. Environ 117 personnes sont impliquées, notamment les pères « fictifs », les intermédiaires et les mères.

Il semble que des ressortissantes marocaines donneraient naissance à leurs enfants à l’hôpital de Melilla, en utilisant l’exemption de visa, et contacteraient des ressortissants espagnols par le biais d’intermédiaires. Comme le rapportent plusieurs médias, les enfants obtiendraient ainsi automatiquement la nationalité espagnole, permettant aux mères de demander des documents espagnols et d’initier les formalités afin d’obtenir un permis de séjour en tant que parents d’un enfant de nationalité espagnole. Elles pourraient également demander ultérieurement le regroupement familial pour les pères des enfants, qui venaient généralement d’un pays n’autorisant pas l’accès à l’espace Schengen. Selon les médias, à la suite de la découverte de ce processus, le parquet de Melilla a été exhorté à prendre « les mesures appropriées pour révoquer la nationalité espagnole des 78 nouveau-nés ».

Child Identity Protection (CHIP) souligne la nécessité pour les États concernés de rétablir rapidement l’identité complète et véritable de ces enfants en enregistrant toutes les informations relatives à leur naissance, soit, dans ce contexte, tous les éléments permettant de pouvoir identifier les relations familiales et les origines de l’enfant.  Il est important que les enfants ne fassent pas l’objet de discrimination en raison des circonstances liées à leur naissance et que tous les États concernés veillent à ce qu’ils ne soient pas apatrides, en invoquant leurs lois discrétionnaires sur la nationalité si nécessaire.

Source: https://www.poderjudicial.es/cgpj/es/Poder-Judicial/Noticias-Judiciales/La-Audiencia-Provincial-de-Guipuzcoa-reconoce-por-primera-vez-la-nacionalidad-espanola-a-una-nina-nacida-en-patera-cuando-se-dirigia-a-la-costa-gaditana (court decision), https://cadenaser.com/nacional/2022/06/08/la-justicia-reconoce-por-primera-vez-la-nacionalidad-espanola-a-una-nina-nacida-en-el-camino-hacia-espana-cadena-ser/ and https://programaodos.org/https://www.elperiodico.com/es/sucesos/20220422/destapan-melilla-fraude-paternidad-78-13552422 and https://www.lavanguardia.com/vida/20220422/8215400/destapan-melilla-fraude-paternidad-78-bebes-inmigrantes.html